L’enfant et le vendeur métallique.


Cet article est le premier d’une série consacrée à l’expérience utilisateur des distributeurs automatiques (boissons et snacks) et son évolution à travers le temps sur deux continents.


L’enfant & le vendeur métallique

La première fois qu’un distributeur automatique a croisé mon chemin, j’étais encore un petit garçon à la piscine communale avec mon école.

À cette époque, les distributeurs automatiques étaient encore assez rares, et après nous être rhabillés nous avions l’habitude de nous agglutiner devant cette grande, intrigante, mais fascinante machine avec les autres enfants en attendant que le bus scolaire nous ramène à l’école.

Certains d’entre nous recevaient des pièces de monnaie de leurs parents à dépenser après la natation. Je n’en faisais pas partie, et donc je regardais avec intérêt et une pointe d’envie le cérémonial d’achat auprès de ce géant de fer de mes camarades. Glisser une pièce de monnaie dans la fente de l’appareil, tapoter sur les boutons le numéro du produit choisi et finalement la chute de ce dernier. Comme la plupart d’entre nous, je crois que j’étais fasciné par l’idée de déposer une pièce de monnaie dans une machine et de recevoir une boisson, un snack… Ou était-ce l’envie irrésistible des chips ?

En grandissant, j’ai pu à mon tour y déposer l’une ou l’autre pièce de monnaie. À cette époque j’étais loin de réfléchir à l’expérience que je vivais lors de mes interactions avec l’une de ces machines, et pourtant ce vécu reste gravé dans ma mémoire. Nous étions au début des années 90.

Beaucoup de choses ont changé depuis ce temps-là, et pourtant, certains de ces distributeurs automatiques existent toujours ou de nouveau sont fabriqués et interagissent de la même façon. Le moment est donc opportun pour repenser à ces expériences vécues.

L’expérience utilisateur d’un enfant

Si vous êtes comme moi, la première chose que vous auriez faite est de déposer une pièce de monnaie dans la fente prévue à cet effet. Cela donne droit au crédit du montant de la pièce. Ensuite, on passe au choix du snack ou de la boisson et là, ça se complique quelque peu. Après avoir passé en revue les emballages, le choix est fait ! Mais attendez un instant, crédit insuffisant… Ce produit est plus cher. Mer…credi ! C’est reparti pour un tour d’horizon des produits, en regardant le produit qui nous tente et le prix indiqué, en petit, au-dessous.

Très bien, cette barre chocolatée sera bientôt mienne. Allez, finalisons la transaction avec notre vendeur métallique. Quel était le numéro en dessous de la friandise ? Soixante-cinq ! (répète dans sa tête “ soixante-cinq, soixante-cinq”) Bip, Bip, Bip (bruit mécanique)Les ressorts se mettent à tourner lentement, mon coeur bat la chamade, je retiens mon souffle. Boum ! Ça y est ! Ma barre chocolatée est tombée dans le réceptacle. Je peux la déguster.

Une bonne expérience ?

Même si à l’époque, je n’ai pas analysé cette expérience, je peux toujours me remémorer les bons et mauvais moments vécus. La plupart sont d’ailleurs toujours d’actualité, ces machines étant toujours sur le marché aujourd’hui. 

Voici, de mon point de vue, les faiblesses d’expérience de ce type de machine :

Tout se passe en général plutôt bien lorsque vous avez le temps. Certes ce n’est pas plus agréable que ça d’acheter depuis cette machine mais ça fonctionne. Lorsque vous êtes pressés par contre, trouver le bon produit, avec le prix correspondant à ce qu’il vous reste en monnaie est complexe et prend du temps. Regarder les produits, trouver le produit, vérifier que le prix correspond. Si “non”, recommencer, si “oui”, retenir le numéro de votre produit. Bien souvent vous vérifiez une à deux fois le numéro du produit pour être sûr que c’est le bon (ce qui ne m’a pas empêché de me tromper dernièrement). De mon point de vue, cela induit une charge mentale, demande un effort qui peut certes paraitre faible aujourd’hui au regard d’un adulte qui s’est habitué à la gymnastique, mais qui peut rester problématique pour une partie de la population. 

Que je sois utilisateur ou juste spectateur, il y a un point noir de l’appareil que je ne cesse de ressentir. Les ressorts (vous savez, ces spirales qui tournent pour délivrer votre produit), c’est une vraie souffrance psychologique de les voir tourner et de ne pouvoir s’empêcher de penser que le produit va rester bloqué. Du coup, j’ai donné un nom à ce point noir :  ghost pain point*.  Vous aussi vous y pensez à chaque fois sans plus vous en rendre compte ? C’est en me penchant sur l’expérience de ces appareils que cela m’est remonté à l’esprit. Cet appareil me stresse et ce stress est inconscient. 

Parlons-en de ces produits qui restent bloqués ! Bien que de temps à autre, si vous chahutez la machine, le produit finira par tomber. Ce n’est pas très agréable comme expérience émotionnelle.

Petit stress également, lorsque vous convoitez le dernier paquet de Grills visible dans la machine mais que devant vous, se trouvent deux personnes. Rien de plus frustrant qu’arriver à la machine et voir qu’elle n’a pas été remplie et que votre chocolat habituel n’est pas présent. Parfois elles ne sont remplies que de moitié à cause de la basse fréquentation. On a alors l’impression que la machine n’a pas suffisamment de débit et que les produits sont là depuis un bon moment.

Bien que cela me semble arriver moins souvent, un billet ou une pièce non reconnue par la machine alors que c’est votre seul billet ou pièce peut être le summum de la frustration. Comme lorsque l’appareil ne crédite pas la somme que vous venez de lui donner !

Que retenir

Le distributeur fait le job, mais je ne vis pas une expérience d’achat agréable. Rien ne me pousse particulièrement à renouveler l’expérience si ce n’est par défaut. C’est une expérience suffisante, du moins pour le début des années 90. Mais peut-on vraiment se contenter de cela aujourd’hui ?

Que dire lorsque le produit reste bloqué ? On peut faire le rapprochement avec une mauvaise expérience d’achat en ligne. Vous en aurez fini avec cette machine pour un long moment. Cette machine vous fera ressentir de la frustration, voir plus.

Résumons, ces distributeurs offrent une expérience d’achat médiocre bien qu’ils fassent le travail. 

Et si une autre expérience était possible, à la même époque ? Je n’allais le découvrir que quelques années plus tard…


Vous souvenez-vous de vos expériences avec ces machines ? N’hésitez pas à commenter et partager vos expériences !


L’histoire continue dans UX —  Distributeurs automatiques, un voyage dans le temps. Partie 2 : Le vendeur métallique au pays du soleil levant


*point de souffrance fantôme


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