Les planètes se sont alignées, notre planning était, une fois n’est pas coutume, figé, nous avons enfin pu participer à SoCraTes FR, la fameuse (un)conference dédiée au Software Craft et Testing. Nous avions beau avoir tout lu sur cette conférence, et échangé avec d’anciens participants, nous n’avions pas forcément pris conscience à quel point elle est différente des autres.

Si vous savez déjà que vous souhaitez y aller un jour, vous pouvez arrêter la lecture de cet article, et garder la surprise.

Si vous n’avez jamais entendu parler de SoCraTes, alors nous allons expliquer comment cet évènement est organisé, et pourquoi il est intéressant d’y participer.

Comme ça a été dit très fréquemment pendant ces 3 jours et demi :

Prepare to be surprised

SoCraTes

SoCraTes (International (un)Conference for Software Craft and Testing) est un réseau international de conférences qui traite de craft et de testing. La première édition a eu lieu en 2011 en Allemagne, mais il existe une petite quinzaine de déclinaisons “locales” dans le monde, dont en France, Belgique, et pour la première fois en 2020, au Canada.

Unconference ?

Une des spécificités de SoCraTes, c’est son format d’unconference.

Ce type de conférence part du principe que bien souvent les moments les plus intéressants dans une conférence sont en fait les discussions dans les couloirs entre les différents talks. Ce format vise à reproduire et encourager ce type d’échange : la discussion entre les participants, en donnant un cadre libre, bienveillant et flexible, qui encourage la créativité et la prise de parole.

Il n’y a pas de speaker, pas de programme prédéfini, seules quelques règles permettent de mettre en place cet environnement.

Les 4 principes

  • Les personnes qui se présentent sont les bonnes personnes : les personnes présentes sont venues à cette session et sont donc forcément intéressées par le sujet. L’échange ne peut donc être qu’intéressant !
  • Ce qui arrive est la seule chose qui pouvait arriver : il n’y a pas de regret à avoir si la discussion dérive du sujet initial. Dans le pire des cas, on peut proposer une nouvelle session pour approfondir le sujet souhaité initialement
  • Ça commence quand ça commence : inutile d’attendre l’arrivée de telle ou telle personne, tout le monde peut apporter quelque chose
  • Ça finit quand ça finit : si la session doit terminer plus tôt, inutile de faire durer pour le plaisir. À l’inverse, si on veut déborder du créneau prévu initialement car le sujet est trop intéressant, il suffit de trouver un endroit libre pour continuer la session (pour l’anecdote, une session sur l’event storming a duré une journée et demi, au lieu des 2h prévues initialement)

La loi des deux pieds

Si vous n’êtes ni en train d’apprendre, ni de contribuer, allez ailleurs

L’objectif de cette loi est de retirer la règle implicite qui dit qu’il est impoli de quitter une discussion. Dans une unconference, il est courant et tout à fait accepté de se lever et de quitter un atelier sans s’excuser ni donner de raison, pour aller à une autre session.

Cette loi permet ainsi de s’assurer que les personnes présentes sont là parce qu’elles le souhaitent réellement et de s’enlever des contraintes que l’on se met parfois, à participer à un atelier qui ne nous apporte rien, plutôt que de partir et participer à une autre session plus adaptée à nos besoins.

Écouter son énergie

SoCraTes n’ayant pas de programme prédéfini et se déroulant dans un cadre privatisé, où les participants vivent ensemble pendant 3 jours, il est tentant (et serait facile) de passer 3 jours complets à échanger avec les autres participants, de 8h à 2h du matin.

Chacun doit rester maître de la manière dont il souhaite vivre ses quelques jours, et il serait totalement accepté qu’un participant ne se joigne pas aux différents points de rassemblements prévus dans la conférence s’il ne le souhaite pas.

Inclusivité et bienveillance

Un effort particulier est fait pour que tout le monde se sente bien durant l’événement. Les nouveaux participants peuvent faire appel à des “budies”, des personnes qui connaissent bien SoCraTes, qui se portent volontaire pour aider les nouveaux participants.

SoCraTes essaie également de cultiver les différences et de sortir du cliché du développeur homme blanc hétérosexuel de 30 ans, barbu à lunettes. Malheureusement, les participants correspondent tout de même beaucoup à ce type de profil (à l’exception de l’age, dont l’amplitude était assez importante).

Château de Massillan

L’édition française de SoCraTes a eu lieu cette année au château de Massillan, dans le Vaucluse. Un hôtel 4 étoiles, avec un restaurant gastronomique, privatisé pour l’occasion.

Crédit : Xavier Nopre

Participants

Autre point fort de cet événements : les participants. SoCraTes aura été l’occasion de rencontrer 60 développeurs passionnés, parfois déjà croisés dans d’autres conférences. Ainsi, nous avons pu échanger avec Nicolas Savois, qui nous avait fait forte impression à MiXiT dans un talk sur le mentoring (cf. Retour sur 2 jours à MiXiT) et discuter de la manière dont le mentoring se passait pour lui aujourd’hui, et retrouver José Paumard, qui nous avait fait une excellente formation il y a 2 ans.

Sessions

Chaque journée suit globalement le même programme :

  • 9h-10h : Définition du programme de la journée, où chacun est encouragé à proposer des sessions : le marketplace
  • 10h-13h : Sessions du matin
  • 13h-15h : Déjeuner
  • 15h-18h : Sessions de l’après-midi
  • 18h-18h30 : Rétro de la journée
  • 18h30-20h : Slack time (sessions informelles)
  • 20h-22h : Diner
  • à partir de 22h : Sessions de nuit

(oui, il y a des sessions nocturnes pour les plus motivés)

Marketplace où chacun pitche sa session
Crédit : Xavier Nopre
Marketplace du premier jour

Exemple de sessions

Les sujets sont très diversifiés, et abordent aussi bien des aspects de langage, de méthodologies, de discussions sur la manière d’apprendre et faire apprendre, …

En vrac, quelques sessions qui ont eu lieu :

  • “Montrez moi du vrai code Haskell qui tourne en production”
  • “Comment implémenter et déployer du Domain Driven Design dans mon entreprise ?”
  • “Discussion autour de la psychologie de l’apprentissage”
  • “Programmons une chanson avec Sonic Pi” (un environnement de développement qui permet de live coder de la musique)
  • “Gambling Driven Development” (tu paries sur l’issue de tes tests, si l’issue n’est pas celle que tu avais prévu, ton code disparait, ce qui te force à faire des baby steps)
  • “Kata en fish bowl mob programming”
  • “Trollons Sonar” et essayons d’avoir un code illisible, mais qui respecte tous les standards définis par les outils de qualité de code
  • KATA !
Fishbowl Mob programming en Haskell
Crédit : Xavier Nopre

Repas

Les repas peuvent également être l’occasion de se regrouper pour discuter d’un sujet particulier :

  • Comment être un bon professeur/formateur
  • Retour d’expérience sur le mentoring
  • Retour d’expérience sur l’utilisation de NixOS au quotidien
  • Power nap
  • KATA !

Sessions “informelles”

Le début de soirée et le soir font également l’objet de sessions organisées par les participants. Au menu :

  • dégustation de vin
  • dégustation de whisky
  • session de refuctoring (opposé du refactoring, ce qui consiste donc à rendre un code illisible, mais fonctionnel)
  • jeux de société
  • jeux vidéos
  • beta test de serious game sur le travail en équipe
  • KATA !
Dégustation de vin
Crédit : Xavier Nopre

Bilan

Cette première a été une expérience enrichissante, grâce à l’excellent travail de l’équipe d’orga, et à la qualité des interventions du facilitateur et de tous les participants.

Niveau budget, l’événement reste très accessible quand on garde en tête le fait que tout est inclus (logement + pension complète), et que l’on profite d’un cadre exceptionnel pendant 4 jours. Le tarif change en fonction de la chambre choisie (chambre simple, double ou triple), avec un maximum de 610€.

Cette conférence a été l’occasion pour nous de renforcer nos connaissances en clean architecture, en DDD, en pair/mob programming, de découvrir un peu la programmation fonctionnelle en Haskell, d’échanger avec nos confrères français, allemands, anglais, …

Il a souvent été question du syndrome de l’imposteur au cours de cette conférence, et bien qu’il soit nécessaire de connaitre un minimum le craft et son écosystème, l’environnement est tellement bienveillant et accueillant que la conférence est tout à fait accessible à des profils “débutants”.

A noter tout de même que la conférence se passe intégralement en anglais, ce qui peut être un frein à l’expression orale pour certains.

Vivement la prochaine édition !