…elle permet d’être exceptionnelle par sa capacité à se lier à nos émotions.
C’est incontestable : mettre l’expérience au cœur de sa stratégie d’entreprise permet de mieux comprendre le point de vue de ses clients/utilisateurs dans la conception de son service. Quelque soit la méthode employée : UX, Design d’interaction, Design thinking, Lean start-up, Nudge, Design Sprint, certaines sociétés l’ont bien saisi en plaçant l’utilisateur au centre de leurs préoccupations.
Oui, mais voilà, répondre à des enjeux stratégiques et business requiert déjà un effort important, alors la notion d’utilisateur se retrouve parfois vite noyée dans une masse de processus et de rituels où aller vite est une nécessité, et où l’agilité prend tout son sens. Malheureusement, dans ces modèles d’itérations très productifs (loin de moi l’idée de remettre cela en question), nous avons vite tendance à voir les personnes cibles comme de simples utilisateurs, c’est-à-dire exécuteur de tâche, et à oublier qui ils sont réellement, c’est-à-dire un être humain, doté d’une capacité exceptionnelle de tisser des liens par les émotions.
Dirigeons-nous vers l’expérience utilisateur : une expérience humaine avant tout.
Comment faire pour ne pas oublier cette notion, l’émotion, qui reste, selon moi, la base d’une expérience utilisateur réussie ? Il faut comprendre que l’UX est l’expérience d’une personne, comprendre que ses actions et émotions sont fortement liées, et aussi comprendre comment s’en servir.
L’expérience DE l’utilisateur.
Lors de ma toute première conférence en 2017, dédiée à l’expérience au service du produit, j’ai tout de suite souhaité mettre en avant une définition du terme de l’expérience utilisateur, mais en y ajoutant la préposition “DE” : l’expérience DE l’utilisateur.
Encore aujourd’hui, si j’ajoute cette préposition quand je parle de l’UX, c’est tout simplement pour rattacher véritablement cette notion d’expérience produit ou d’expérience de service à celle d’une personne. Car oui, un utilisateur est une personne, un être humain, capable de s’exprimer par les gestes qu’il accomplit mais surtout par les émotions qu’il transmet à autrui par le processus qu’est l’empathie. J’y reviendrais un peu plus tard.
Ce n’est pas parce qu’une personne est capable de réaliser une tâche qu’elle le fera nécessairement et avec succès.
L’état émotionnel d’une personne au moment de réaliser une action est impacté fortement par des facteurs externes au produit ou services utilisés. Il faut alors se placer dans un contexte bien plus large prenant en compte le “contexte environnemental” : c’est-à-dire où elle se trouve au moment de réaliser une tâche ; mais également “le contexte temporel” : ce qu’elle faisait avant d’exécuter la tâche, à court, moyen et long terme.
La prise en compte des notions de contexte environnemental et temporel nous permet ainsi de comprendre dans quel “état d’esprit” cette personne se trouve afin d’anticiper la façon dont elle va interpréter les différentes actions à réaliser avec le produit ou le service.
Nous sommes capables de lier nos actions à nos émotions.
Dans son documentaire “Entre toi et moi, l’empathie”, Valéria Lumbrosco, sur l’appui d’études scientifiques, démontre que les émotions permettent à l’être humain de s’exprimer. Qu’elles sont fortement liées à notre capacité à prendre en compte le point de vue de l’autre ! C’est par ailleurs inné chez l’homme et cette faculté se développe entre 9 et 11 mois chez l’enfant.
Se mettre à la place de… permet de comprendre l’autre.
Lorsque vous regardez un funambule, étrangement, vous avez l’impression de ressentir la même chose que lui, le stress, la peur, l’anxiété, la montée d’adrénaline. Cela est simplement dû au fait que le cerveau humain est capable de lier des actions à des émotions, en se mettant à la place de l’autre personne. Car, chez l’homme, il existe 2 types d’empathies :
- l’empathie émotionnelle : capacité à reconnaitre l’émotion de l’autre
- l’empathie cognitive : capacité à en comprendre les raisons
Lors de la conception d’un produit ou service, arrêtons de croire que notre cheminement de pensée est tout à fait logique, tout à fait rationnel, cela est faux.
En tant qu’être humain, nous avons cette incroyable capacité à nous laisser déborder par nos émotions, venant ainsi déjouer toute logique constructive. Nos émotions viennent impacter nos actions.
Ce pour quoi, lors des études d’expérience produit, il faut accentuer les phases de recherche sur les émotions. Et s’appuyer sur ces dernières pour comprendre l’utilisateur et donner du sens à ses actions. Puisque, rappelons-le encore une fois, les émotions et les actions sont fortement liées.
Se servir des émotions, l’une des clés de la conception d’expérience.
Prenons l’exemple d’une plateforme téléphonique traitant les appels clients de la société X. Cette société X a formé son service à une multitude de réponses possibles à apporter au client en fonction de sa problématique d’appel.
Le conseiller téléphonique alors armé de ses réponses toutes faites est prêt à prendre le client en main. Cependant, ce à quoi ne s’attend pas le conseiller, ce sont les flux émotionnels d’un client mécontent. Ce flux émotionnel négatif risque de se propager chez notre conseiller et provoquer un enchaînement de mécontentement entre le client et le conseiller et donc une mauvaise expérience client à la clé. Ce que vit le conseiller est-ce que l’on appelle la contagion émotionnelle.
La contagion émotionnelle c’est comme le fou rire de notre voisin qui va se propager à nous même. Un mimétisme provoqué par les neurones miroirs. Je vous passe les détails, mais vous aurez compris ici que notre utilisateur et son comportement à l’utilisation du service sont fortement liés à “sa condition humaine” et que le considérer comme un simple exécuteur de tâche serait une erreur.
Comprendre donc les émotions qui viendront interagir pendant les phases du service permettrait de déjouer certains pièges et donc améliorerait l’expérience client. Apprendre à comprendre les émotions et à s’en servir pour construire et améliorer l’expérience.
Un article du magazine Harvard Business Review de janvier 2019 intitulé “Être « désolé » ne suffit pas” dont un extrait est disponible en ligne démontre par plusieurs recherches scientifiques comment le traitement du langage relationnel et la compréhension d’autrui permettent de dénouer des conflits dans le cadre d’une relation client.
Pour mieux comprendre le processus de décisions d’un utilisateur, il faut mesurer…ses émotions.
Nous, tout comme nos clients, nos utilisateurs, sommes guidés par nos émotions. Que cela soit de façon consciente ou non, dans nos choix difficiles ou dans notre quotidien, nous sommes humains, les émotions font partie de nous.
Les émotions nous font prendre des décisions rapides adaptées à la situation.Il est donc important de les inclure dans la conception du service afin d’amener l’expérience vers un contexte émotionnellement fort.
Cela fait partie intégrante de mon job : l’analyse des émotions. J’intègre systématiquement la mesure des émotions dans mes phases d’audit UX.
Que ce soit pour un produit ou pour un service, la mesure des émotions reste la clé vers à la compréhension de l’utilisateur.
Si nous travaillons avec les émotions, c’est pour offrir des expériences mieux travaillées, plus personnelles, plus humaines !